Les cols de Vars et d’Izoard pour la première fois
Après avoir franchi la colle Saint-Michel et le col d’Allos, le Tour de France fait connaissance avec les cols de Vars et d’Izoard, Il faut ensuite atteindre Briançon. Les coureurs entrent par la ville basse (Sainte-Catherine) puis grimpent un raidillon qui les mène au Champ de Mars à 1300 mètres d’altitude.
Un reporter du « Miroir des Sports » relate son aventure au sommet de l’Izoard : « Notre rapide et souple 18 HP Voisin nous avait amenés tout là-haut, à la Case Déserte, un lieu d’une solitude farouche, déchiqueté, grandiose, ce que la nature nous a montré de plus émouvant dans le Tour. Nous attendions le peloton de tête dans lequel figuraient Alavoine, Thys, Sellier, Hector Heusghem etc. Un vent glacé, malgré le gai soleil et le ciel très bleu, traversait ce paysage d’Apocalypse. Les spectateurs n’étaient pas nombreux. Quelques automobilistes venus de Barcelonnette et de Briançon puis deux piétons qu’on s’étonne de trouver là : un très vieux paysan et un petit gars de 12 ou 13 ans. Le vieux m’explique qu’il habite depuis toujours le village de Brunissard, au fond de la vallée. L’hiver, il s’y enferme dans son étable pour profiter de la chaleur des bêtes. La neige, qui atteint 20 mètres d’épaisseur en certains endroits, obstrue toutes les voies de communication. Au printemps, le bonhomme aide les cantonniers à remettre en état la route du col. La veille de notre passage, il est tombé de la neige et il a fallu déblayer le chemin. Le petit gars, lui, se lève à quatre heures et demie, grimpe dans la montagne avec ses moutons et rentre à sept heures et demie du soir. Tous deux nous prennent pour des touristes. Ils ignorent la course, ils n’ont jamais entendu parler du Tour de France. Je leur explique qu’ils vont voir passer des coureurs grimpant le col à bicyclette. Le petit sourit. Le vieux n’a pas l’air de comprendre. Le peloton de tête arrive. Ces cyclistes, vêtus de maillots aux couleurs vives, ruisselants de sueur, tendus de toute leur énergie dans un effort désespéré, que représentent-ils pour ce vieillard et cet enfant, ignorants de tout ce qui n’est pas leur montagne ? Je n’arrive pas à l’imaginer. Le petit ouvre de grands yeux ravis. Le vieillard, simplement, enlève son chapeau et le vent glacé bouleverse ses mèches grises. » Les temps ont bien changé.

 Triplé de Thys ; Alavoine gère
Chute ou crampes d’estomac pour Philippe Thys ? Toujours est-il que l’Anderlechtois franchit le col d’Allos avec 2’45’’ de retard sur 7 hommes groupés (Alavoine, Alancourt, Sellier, Lambot, H. Heusghem, Beeckmann et Rossius). Pas grave. Nous retrouvons Thys en bien meilleure état sur le « sol déplorable » (Desgrange « L’Auto ») du col de Vars où il bascule, seul en tête, 1’ avant ses plus proches compagnons de route. Lambot qui a crevé dans la descente du col d’Allos est relégué à 5’50’’.
Thys rejoint, le col d’Izoard est monté au train par le maillot jaune Alavoine, suivi, bien sûr, de Thys, de Sellier, H. Heusghem et Beeckmann. Oui, mais à 200 mètres du sommet, Alavoine crève et le voici, au col, avec 3’ de retard sur le quatuor précité. Ma foi, rien de bien inquiétant puisque son plus proche adversaire, Hector Heusghem, pointe à la 5ème place du général à plus de 49’. Alavoine n’en produit pas moins un bel effort et reprend, en 24 km, 2’30’’. 4ème de l’étape, le « Gars Jean » a fait un pas de plus vers la victoire.
Quant au lauréat du jour, il se nomme, pour la 3ème fois consécutive, Philippe Thys qui a profité de l’arrivée pentue à Briançon pour faire la différence.
Lambot (2ème du général) termine 7ème à 3’49’’.

 Classement de l’étape

 Classement général