Heusghem maillot jaune virtuel
L’étape va-t-elle aujourd’hui prendre des allures de folie ? C’est ce que chacun peut se demander lorsque, au sortir de Narbonne (km 63), le leader de l’épreuve, Léon Scieur, "s’arrête un instant, pose sa machine à terre et une auto lui détend 6 rayons" (H. Desgrange "L’Auto"). Le peloton arrive à Béziers avec plus de 5 minutes d’avance sur lui. Hector Heusghem, 2ème du général à plus de 4’, va-t-il lancer la grande offensive, si loin de l’arrivée ? Non, rassurez-vous, l’incident est clos 10 km après Béziers.

Le Tour de France aimait déjà faire passer les coureurs à proximité des lieux chargés d’histoire, ici les arènes de Nîmes (km 215).

 Mauvaise opération pour Heusghem
Plus rien à signaler avant La Ciotat (km 379) où nous retrouvons 10 hommes ensemble : Scieur, Heusghem, Lambot, Mottiat, Tiberghien, Sellier, Despontin, Goethals, Amenc et Lucotti. Il reste une trentaine de kilomètres à parcourir, une trentaine de kilomètres ponctuée de fortes rampes. Scieur en profite pour tester ses adversaires. Lambot et Lucotti lui emboîtent le pas, pas Heusghem (6ème de l’étape) qui perd 1’6’’ dans l’affaire.

  Lucotti adoubé
A l’avant, Scieur (4ème de l’étape à 1’17’’) est le premier à céder devant les coups de boutoir de Lucotti. Le Lombard (5ème du classement général) est impressionnant : "Quand Lambot mène, l’aiguille de notre compteur de vitesse marque toujours 2 kilomètres de moins à l’heure que pour Lucotti. J’ai vu, quand Lucotti menait, l’aiguille marquer du 38, du 40, du 42 à l’heure ; je l’ai vue une fois accuser du 45 ! Qu’en dites-vous ? Dans notre Diétrich, nous étions sidérés" (H. Desgrange "L’Auto"). Une chute à 5 km de l’arrivée semble un temps perturber le destin de l’Italien mais, qu’à cela ne tienne, l’enfant de Voghera revient sur Lambot et le bat si facilement "qu’il se relève 50 mètres avant le poteau, et de ses deux bras de gamin, son guidon lâché, il envoie des baisers au public qui l’ovationne follement".
Luigi Lucotti, 3ème du Tour d’Italie 1914, est, à l’heure actuelle, le seul coureur ni-Français, ni-Belge à avoir remporté au moins une étape du Tour depuis la fin de la 1ère guerre mondiale (3 en l’occurrence puisque Lucotti s’était déjà imposé lors des 12 et 13èmes étapes du Tour 1919, année où il a fini 7ème de la Grande Boucle). Desgrange n’est pas un ingrat : il parvient à faire en sorte qu’à partir de Perpignan, Lucotti qui roule sur une machine de marque italienne, ait droit aux mêmes égards que les As belges ou français. Ceux-ci sont "soignés, dorlotés" ("Miroir des Sports") par le consortium "La Sportive" dirigé par Alphonse Baugé. Il en sera désormais de même pour l’Italien qui aura à ses services un mécanicien, un masseur et un préposé au ravitaillement. Des privilèges, oh combien, précieux !

Lucotti (1893-1980) rayonnant à son arrivée à Toulon.

 Classement de l’étape

 Classement général